J’ai profité hier d’un long trajet ferroviaire pour dépiauter le numéro 11 du
Marteau & l’Enclume (à l’exception de l’AVH finale que je me réserve pour plus tard).
Evidemment, je me suis délecté de l’esprit de synthèse et d’exhaustivité dont témoignent les auteurs, qui outre les classiques traitent d’œuvres méconnues ou même inabouties.
A la critique sans langue de bois des huit volumes de
La Voie du Tigre (ce qui donc inclut la préquelle et la séquelle), succèdent les commentaires sur tous les livres-jeux se déroulant sur le monde d’Orb ou nantis d’une ambiance orientalisante.
Le Talisman de la Mort évidemment, ainsi que sa suite
Retour à Griseguilde de Voyageur Solitaire, mais également d’autres
Défis fantastiques et des « non Gallimard ». Puis viennent les scénarios de
Donjons & Dragons baignés de cette atmosphère, le projet avorté d’un JDR inspiré de
La Voie du Tigre, ou encore les productions ultérieures du duo Smith & Thomson, voire le « bundle » d’un passionné ayant repris et fusionné les deux premiers volumes de la série
Destins.
On remarquera une analyse poussée du binôme Tyutchef / Cassandra, soulignant l’imbrication plus qu’ambiguë de cette dernière dans le destin du Ninja (qui personnellement m’évoque la relation amour-haine liant les héros de BD Kriss de Valnor et Thorgal Aegirsson).
Et toute une série d’interviews, par exemple de David Walters, qui formule la difficulté qu’induit la greffe de nouvelles aventures en amont comme en aval d’une série existante, mais aussi du traducteur, du rééditeur, et cerise sur le gâteau, de Mark Smith en personne. Il nous dévoile tout un pan de l’histoire des LDVELH, les origines et l’évolution de la série, les procédés de création et de répartition des tâches entre les auteurs (où on retrouve évidemment Jamie Thomson mais aussi Dave Morris), les rapports parfois conflictuels avec les éditeurs (ce qui enfin nous explique la traumatisante queue de poisson des
Démons du Manmarch), leurs autres œuvres interactives, dont une partie seulement s’est vue traduite en français, ainsi que leur nécessaire reconversion vers d’autres niches ludiques et littéraires quand le soufflé des livres-jeux est lentement mais sûrement retombé.
Le tout saupoudré d’une riche iconographie, souvent tirée des œuvres originales, et parfois inédite, comme une magnifique carte d’Irsmun.
Concernant les critiques de
La Voie du Tigre, je me permets d’ajouter mon grain de sel. Les auteurs décrivent abondamment le panthéon foisonnant du monde d’Orb, mais oublient un point à mon sens essentiel du lore, et qui influence la jouabilité : à l’axe Bien / Mal sur lequel se répartissent les dieux, se superpose perpendiculairement un axe Ordre / Chaos. Les Palaches de Dama par exemple croient aux vertus de l’Ordre, mais ne sont pas persuadées que le Bien est préférable au Mal.
Ils omettent également de mentionner ce qui reste selon moi le principal défaut de la série : dès le deuxième volume, certains combats incontournables (ou quasiment) sont statistiquement impossibles à gagner (ou quasiment) sans la maîtrise d’une certaine discipline, le cumul de certains points, la possession de tel objet. Ce qui déséquilibre fâcheusement la série en OTP (ou quasiment), laisse une trop grande place au hasard et handicape gravement ceux qui n’ont pas jouquiné les deux premiers opus, qui rassemblent absolument tous les bonus en Habileté. Je cite par exemple le combat contre Mardohl dans
Les Parchemins de Kettsuin, pour ainsi dire infaisable à moins de recourir à un artefact magique ET d’avoir appris le Fléau de Kwon.
Enfin, pour faciliter l’ergonomie, un sommaire détaillé avec les numéros de page serait souhaitable, en début ou en fin de mook.
Sur ces réserves que j’espère constructives, je complimente encore toute l’équipe d’investigateurs pour leur travail reflétant une passion de malades.