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Sujet: Cyclades Jeu 16 Juin 2022 - 0:34
Incarnez l’un des trois personnages de Cyclades, masculin ou féminin, et prenez en main sa destinée. Au cours d’une implacable course contre le temps, votre mission vous poussera vers les divinités et créatures de la Grèce mythologique. Les îles des Cyclades baignées de soleil abritent des contrées hostiles. Pour atteindre votre but, vous devrez gagner le soutien de noms fameux et affronter des monstres légendaires, peut-être même la colère des dieux. Parmi les huit fins victorieuses, laquelle sera la plus honorable ?
Wor Maître d'armes
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Sujet: Re: Cyclades Jeu 16 Juin 2022 - 0:49
Un somptueux livre-jeu sur la mythologie grecque, un des plus gros livre dont vous êtes le héros qui soit, on a vraiment l'impression d'avoir quelque chose dans les mains.
650 paragraphes dont la plupart sont très longs ! Des descriptions savoureuses de grandes qualités. On peut vraiment savourer la mythologie grecque qui est très riche, avec cet ouvrage. On va rencontrer dieux, demi dieux et personnages épiques dans cette ambiance qui va si bien !
L'aspect jeu n'a pas été oublié, avec une gestion du temps et des déplacements qui est très bonnes, un système de règles simplifiées ou avancées, au choix du joueur. Et plusieurs niveaux de difficulté. (Pour ma part j'ai fini le livre en mode épique, règles simplifiés, il m'a fallu 11 tentatives pour en voir le bout). La mécanique est parfaitement huilée ,avec un système de code, d'objets et de muses à trouver, et de gestion des points d'héroïsme. Peu linéaire et cela malgré le style romancé, et ça fallait le faire !
Peut être on peut regretter que les descriptions soient un peu trop longues défois, mais c'est vraiment pour chipoter. Vraiment un très bel ouvrage, bravo pour ce massif travail d'écriture !
Note : 18/20
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Damohl Bouche du Néant - Fils du Vide
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Sujet: Re: Cyclades Sam 19 Oct 2024 - 11:41
Avec les livres-jeux et les AVH d’Outremer, j’avais déjà pu éprouver avec un intérêt aiguillonné de nostalgie ce que j’appellerais la littérature interactive « de deuxième génération ». Ces œuvres visiblement composées par d’anciens jouquineurs chevronnés, qui ont lu, connu, et surtout aimé les Livres dont vous êtes le héros des années 80/90. Des auteurs qui, désireux de reprendre, approfondir, améliorer le concept, ont su en analyser, décortiquer, décomposer la mécanique, pour mieux la reconstruire, la dépasser, sublimer leurs devanciers et modèles, afin de partager avec enthousiasme et complicité le fruit de leur travail passionné à la communauté avertie... d’autres anciens jouquineurs chevronnés.
C’est exactement ce doux frisson de « madeleine améliorée » qui m’a parcouru tandis que je parcourais Cyclades d’Emmanuel Quaireau, un livre-jeu exceptionnel, transcendant avec bonheur le genre arborescent. L’auteur fait autant preuve d’érudition, de sensibilité, de maîtrise de la langue, que d’esprit ludique. Une narration exemplaire se met au service d’un système de jeu éprouvé, les dimensions littéraire et ludique s’imbriquent et s’équilibrent harmonieusement. Voilà, comme de trop peu coutume, une histoire plaisante à lire ET à jouer.
Je vais vous en livrer mon analyse en quatre parties. Comme à mon habitude, je vais tâcher de me montrer succinct pour les forumeurs simplement désireux d’une brève mise en bouche, et laisser aux plus fureteurs les détails sous spoil.
I. L’aventure (globalement)
Dans la droite ligne de la trilogie Chroniques crétoises (à laquelle Cyclades se réfère et se rattache explicitement) nous nous retrouvons dans le contexte de la mythologie grecque. Nous incarnons une héroïne ou un héros de l’Antiquité classique, à choisir d’entrée de jeu entre trois « prétirés » : Antianera l’Amazone, Brasidas le Spartiate, Euclès le Frondeur. Mandaté(e) par le dieu Héphaïstos, nous sommes chargé(e) de retrouver son infidèle épouse Aphrodite à travers l’archipel des Cyclades, composé de quatorze îles visitables.
II. La dimension littéraire
Et chacune de ces îles a ses particularités.
Spoiler:
Paros exporte des céréales (quand Déméter n’est pas chagrine), et Naxos, du vin, Syros constitue un actif comptoir commercial, Kythnos et Sifnos connaissent au contraire une période de déclin, Ios et Céos sont à demi sauvages, Délos abrite un temple dédié à Apollon, etc.
Evidemment, nous pouvons glaner sur certaines des renseignements relatifs à une autre.
Spoiler:
A Mélos par exemple, nous avons vent de l’épidémie de peste qui sévit sur Ios. Sur Sérifos un vieillard que nous avons sauvé de la noyade connaît les « crabes bâtisseurs d’Ios », que nous retrouvons en effet sur le seuil d’une grotte de cette île qu’une habitante appelle le « trou aux crabes ». Et comme on le verra, du point de vue ludique, chaque île se distingue par une aventure sensiblement différente.
En effet, nous baignons dans une authentique atmosphère méditerranéenne, et les descriptions touchent aux cinq sens.
Spoiler:
Les rires des mouettes nous tirent de notre sommeil, et nous contemplons, comme chez Homère, « l’aurore aux doigts de rose » sur la mer Egée souvent versatile, escorté(e) parfois par le joyeux caquètement de dauphins. Nous protégeons nos yeux de la clarté aveuglante du soleil. Nous arpentons des maquis de chênes-lièges et de buissons épineux, détalons à travers les touffes de lavande et les lauriers-nains, contemplons des coteaux recouverts d’oliviers, d’amandiers et de vignes, voyons s’envoler les cailles et les tourterelles, profitons de la fraîcheur d’une forêt d’eucalyptus et de cèdres, vidons notre esprit sous le couvert d’un abricotier. Nous entendons les stridulations rythmiques des insectes nocturnes, éprouvons l’aridité des montagnes persanes à travers le souffle d’un chaud vent d’est, respirons le parfum entêtant de la lavande, sentons l’air s’embaumer de lilas, aspirons le suave et résineux parfum des pins dont la sève se caramélise au soleil, humons le fumet de venaisons grillées, des odeurs de poisson fumé nous accompagnent dans les ruelles, mais nous pouvons également nous voir incommodé(e) par les remugles de grains d’orge pourrissants, ou suffoquer dans un immonde effluve de puanteur fécale, de viscères et de sang. Nous savourons des tentacules de pieuvres grillées agrémentées d’une purée de pois chiches, du poisson frit agrémenté d’une purée de tubercules, des galettes d’avoine dégoulinant d’huile d’olive, voire des prunes fourrées à la viande de chèvre ou des œufs au poivron, nous délectons de gâteaux épicés de cannelle, de gingembre et de miel, mordons dans des grenades juteuses et acidulées, goûtons dans une coupelle en noisetier un vin maison au fort goût de raisiné, dégustons de l’haoma dans une corne de bœuf, voire le fameux vin couleur rubis de Naxos, que nous connaissons de réputation, mais parfois nous contentons plus frustement d’œufs durs et d’avoine bouillie, de poisson mariné, voire de biscuits aux raisins secs accompagnés de lait de chèvre.
De plus, la narration n’est pas avare en péripéties secondaires conférant de l’épaisseur au personnage et à l’histoire.
Spoiler:
En pleine action, nous examinons le terrain afin d’en tirer quelque avantage. Subitement pris(e) de doute, nous nous assurons par le toucher de notre tangibilité. A l’entrée d’un port, d’autres navigateurs nous saluent depuis d’autres embarcations, nous évitons soigneusement d’abîmer des casiers de pêche, abordons un ponton couvert de moules, de sympathiques vieillards nous aident à l’amarrage, nous aidons une fille-mère à remplir ses cruches, consolons un enfant qui pleure, baguenaudons dans un marché pour refaire nos provisions, saluons respectueusement un cul-de-jatte, etc.
Tout comme dans les Chroniques crétoises, on rencontre, en sillonnant la mer Egée, des actants de l’histoire et de la mythologie grecque, mais concernant cette fois d’autres épisodes, et pour le plus grand profit de notre culture générale !
Les trois personnages jouables, Antianera l’Amazone, Brasidas le Spartiate et Euclès le Frondeur, apparaissent en effet dans les récits historiques et mythologiques. (Euclès par exemple serait selon Plutarque le soldat qui a couru jusqu’à Athènes pour annoncer la victoire de Marathon.)
J’ai déjà mentionné notre commanditaire Héphaïstos, qui exhale une odeur de métal chauffé au soleil. Il détient captif son demi-frère Apollon dont le regard intense nous fait détourner le nôtre. Viennent ensuite…
Spoiler:
… les Neuf Muses que nous avons chacune l’opportunité de côtoyer brièvement dans l’exercice de leur art respectif (dont Erato dans son plus simple appareil, Polymnée qui se montre aussi pincée qu’une maîtresse d’école, ou Melpomène, qui paradoxalement souhaite que notre aventure ne s’achève pas en tragédie). Nous pouvons rencontrer Déméter déguisée en vieille femme, célébrer ses rites sacrés (comme Althéos à Eleusis, avec une absence totale de consigne et donc avec autant de risque de se foirer), nous voir présenté(e) à la titanide Léto, danser avec des sirènes étrangement bien disposées à notre égard, participer à une bacchanale emmenée par Dionysos, voire subir son courroux de mari jaloux dans une scène digne d’un vaudeville (mais à l’issue terrible pour nous), entendre les Erinyes invectiver Thanatos, savoir qu’elles ont poursuivi Oreste, combattre le serpent Python, la gorgone Méduse (devançant Persée comme Althéos s’est substitué à Thésée), le démon Alastor (bien qu’il ne me semble pas propre à la mythologie grecque), le monstre marin Céto, défier au pugilat Pollux (qui lui-même se vante d’avoir vaincu Onomaste de Smyrne à cette discipline), nous voir pourchassé(e) par des dryades, ballotté(e) par les bourrasques d’Euros, dieu du vent de l’Est et de l’automne, prétendre passer de Charybde en Scylla ou ne connaître une Muse ni d’Ouranos ni de Gaïa, chausser les sandales ailées d’Hermès, goûter à des pommes des Hespérides, estimer qu’une vieille femme a déjà « une jambe et les trois quarts de l’autre dans le royaume d’Hadès », connaître l’Erèbe comme une région des Enfers, Thulé comme une mythique île septentrionale, nous imaginer dériver dans le souffle primordial du Chaos originel, apprendre qu’Arès ne brille pas par son romantisme (ce qui ne constitue pas un scoop). Nous pouvons consulter les trois Grées qui se partagent un œil, discuter avec Pythagore et son disciple Phérécyde, croiser la route d’une trirème carthaginoise, répliquer à la voix froide et coupante d’Héra nimbée d’une aura de majesté (et nous voir confirmer, comme dans La Vengeance d’Althéos, qu’elle ne porte pas son fils Héphaïstos dans son cœur, et réciproquement), comme Actéon surprendre Artémis en train de se baigner (et en subir les conséquences si on est un homme), faire alliance avec les Aloades Ephialtès et Otos pour cambrioler de concert la demeure sous-marine de Triton. Nous traversons les Enfers (la catabase récurrente des épopées grecques), un lieu de désolation et d’opulence mêlées, où le temps et l’espace n’obéissent plus aux lois naturelles, pour implorer (en lieu et place de Déméter) le retour de Perséphone auprès de Hadès (dont j’ai appris un autre nom : Polydegmon). Nous disputons publiquement contre le sophiste Diagoras prônant l’athéisme, prétendant libérer les peuples de l’obscurantisme (avant Voltaire) par « les discours et la méthode » (avant Descartes) et au terme de sa harangue voir la Vénus de Milo perdre ses bras (selon une autre version que celle du film Astérix aux Jeux olympiques). Nous nous émerveillons du palais de Poséidon, en forme de perle luminescente reposant sur une coquille géante, et dont les murs sont recouverts de coquillages nacrés. Nous voyons le roi Polydectès poursuivre (lourdement) de ses assiduités la fragile Danaé, bannie et laissée sans défense par son père Acrisios. Nous rencontrons l’expédition des Argonautes, échangeons avec certains de ses membres, comme Jason que l’on a déjà aperçu aux jeux panhelléniques d’Athènes, le pilote Tiphys, Héraklès qui aiguise sa hache (et compare notre mission à un treizième travail), Orphée dont la lyre nous berce, ou d’autres moins connus, comme les Boréades Calaïs et Zétès. Et nous pouvons même, cerise sur le gâteau, rencontrer Zeus en personne, en ressentir un sentiment d’insignifiance absolue. Quant à Aphrodite, l’objet de notre quête, dans l’esprit peu bégueule de cette œuvre, elle jouit, d’une description détaillée (depuis le balancement hypnotique de ses hanches jusqu’à ses tétons qui pointent) dont la sensualité semble condenser maints fantasmes d’adolescent (et presque représenter une récompense en soi pour le jouquineur victorieux). Ajoutons qu’en femme accomplie, elle sait tout autant jouer de ses charmes pour arriver à ses fins, qu’exposer avec franchise sa conception plénière de l’amour, sentiment essentiellement bénéfique qui ouvre aux autres et s’oppose au stérile repli sur soi.
Du point de vue du contexte, même les PFA valent le détour.
Spoiler:
On peut se retrouver pétrifié(e) par la Méduse, assommé(e) pour le compte par les Aloades, transformé en cerf par Artémis, errant pour l’éternité dans les Enfers ou réduit(e) en esclavage dans les mines du Laurion. Sans parler des paragraphes victorieux.
Et le raccord est établi avec les Chroniques crétoises.
Spoiler:
En effet, sur Naxos, Ariane (dont le palais est ravitaillé par un certain marchand phénicien du nom de… Markos) nous présente son fils Œnopion, nous raconte comment elle a aidé « un Athénien » à vaincre le Minotaure, avant de se voir piteusement abandonnée par cet homme, dont on ne doute aucunement qu’il s’agisse de… Thésée. (Euclès se souvient même avoir aperçu à Trézène… « son frère Althéos » dont il ne nous dira rien de plus.) Touché par l’isolement et la solitude où s’étiole la princesse crétoise sur une île pourtant opulente, délaissée par son mari Dionysos, nous pouvons même (si nous jouons l’un des deux héros masculins) engager (enfin) avec elle l’idylle romantique qui nous avait échappé au tout début de L’Odyssée d’Althéos (je soupçonne l’auteur d’avoir voulu effacer une antique et générationnelle frustration ).
Des PNJ et des créatures semblent en revanche issus de l’imagination fertile de l’auteur, car je n’en ai pas trouvé d’équivalents dans la mythologie grecque. Comme en tout exercice de transposition littéraire, imitation et innovation vont de pair.
Spoiler:
A quoi correspondent ces petites bestioles grises sur le mont Panagias, ces immondes rats cornus à la queue de vipère dans le village de Platana, cet Esprit de Pourriture sur l’île de Paros ? La mythologie grecque mentionne-t-elle vraiment (au mépris de la zoologie) des gloutons sur l’île de Naxos, des amphisbènes sur Mykonos, une taupe géante à Délos voire une anémone géante gardant le palais de Poséidon ? Les ananas n’existaient alors qu’en Amérique. D’où sort ce morceau de néant dans le repaire d’esclavagistes de Sifnos ? L’automate Golété qui nous accompagne aux Enfers m’a fait penser au petit robot Nono, de la série Ulysse 31 (la mélancolie en plus), et l’Œil qu’on y combat semble tout droit sorti d’un jeu vidéo du genre Dungeon Master ou Legend of Grimrock, de même que le tunnel sous-marin dans lequel nous progressons linéairement sans scaphandre et affrontons successivement des adversaires dans le royaume de Poséidon. Le vaisseau fantôme « Macaria » qui porte le nom d’une fille d’Hadès, m’évoque les très contemporaines (et très glauques) backrooms. Je n’ai pas pu situer Estefan, le neveu de Polydectès, ni Vaxène, maître d’armes d’Œnopion, ni Clytemnon, dont la voix aiguë grince dans la salle du trône d’Hadès, ni le maniéré Euclimène, serviteur de Dionysos, accompagné de son lynx Edalgo, ni Dolonite, Justinès et Honiclas comme disciples de Diagoras. Je n’ai jamais entendu parler d’une sage nommée Eurmène, ni d’un palais d’Aégide dans le royaume sous-marin de Poséidon, ni des Thalassandres, ces murènes hybrides qui le protègent, ni d’une tribu scythe nommée « Brise-Kourganes », ni d’un guerrier scythe appelé Pelomaos l’Apostat qui en outre eût détenu celle des vents d’Eole. (Mais si les membres de la tribu dudit Pelomaos brisent effectivement les kourganes, alors oui, il s’agit de sacrés apostats.) Et quand j’ai tapé « nékropaïs » sur Google, je n’ai eu pour toute réponse qu’une critique de Cyclades.^^ Pour autant, ces immondes nourrissons morts-vivants ne m’ont pas paru dépareiller parmi tous les monstres avérés et cités de la mythologie grecque. (Et s’il s’agissait des nouveau-nés difformes exposés par les Spartiates ?)
J’ai relevé également quelques écarts ou ajouts par rapport à la version « officielle ». Mais je me garderai de taxer l’auteur d’approximation. La mythologie grecque, elle-même synthèse d’autres mythologies, constitue un matériau malléable, susceptible de réécritures, se superposant en versions différentes, parfois contradictoires, et constamment remanié à travers les siècles. Le héros lui-même admet connaître deux prétendues localisations différentes de la demeure d’Eole.
Spoiler:
Ainsi, une sirène assure qu’Aphrodite a voulu la forcer à épouser le roi Priam, avant de se rabattre sur Hélène de Sparte, « avec les conséquences que l’on sait ». Mais Hélène a épousé Ménélas de Sparte, et c’est son rapt d’Hélène par Pâris (aidé d’Aphrodite) qui a déclenché la guerre de Troie. La princesse spartiate n’a jamais épousé Priam. (Ceci dit, qui se souvient qu’Hélène a également été enlevée par Thésée ?) Je n’ai jamais lu, vu ou entendu qu’Héphaïstos avait capturé Apollon, ni que Triton avait dérobé un bijou aux Aloades. Le chien bicéphale Orthos bien qu’il soit le frère de Cerbère, ne se nichait pas dans les Enfers : il appartenait au géant Géryon. Je n’ai pas retrouvé qu’Oreste aurait dû son salut à une mésentente entre les Erynies, mais peut-être devrais-je lire la tragédie éponyme d’Eschyle, ou relire Les Mouches de Sartre, qui mettent en scène ces personnages. Enfin, selon Wikipédia, Phérécyde est l’oncle, et non le disciple de Pythagore. (Mais on peut postuler une identité ou une homonymie entre oncle et disciple.)
On note également une touche extrême-orientale.
Spoiler:
Castor s’enquiert auprès de Brasidas sur un certain traité militaire écrit dans la lointaine Sérique. On devine L’Art de la guerre du Chinois Sun Tzu, effectivement contemporain à la Grèce classique. Ou le capitaine perse Elymaïs jure par un esprit démoniaque zoroastrien appelé Ahriman.
Voire quelques allusions à des problématiques contemporaines, des anachronismes si l’on veut.
Spoiler:
Les habitants de Kythnos souffrent de la surexploitation forestière et se voient dans la nécessité d’amorcer une réorientation économique. (Bien sûr, ils en accusent la Méduse !) Héphaïstos envisage un char capable de cracher le feu, prototype du tank. Nous sommes propulsé(e) au sommet de l’île de Théra par un genre d’ascenseur à magma, accédons à l’antre de Poséidon par un espèce de toboggan. D’une façon générale et sans entrer dans les détails, les personnages tiennent des discours qui me semblent refléter la mentalité et les préoccupations d’un(e) jeune adulte occidental du début du XXIème siècle, tout comme les auteurs qui ont réécrit la mythologie grecque à travers les âges l’ont pondérée en fonction de leurs cultures respectives.
Mais dans la tradition des Livres dont vous êtes le héros, qui s’adressaient essentiellement à un public d’adolescents masculins, nous avons aussi droit aux scènes bien gore que celui-ci appelait.
Spoiler:
Un ennemi blessé à mort a le crâne broyé, un autre tente de retenir un morceau d’intestin qui s’écoule de son abdomen déchiré, des entrailles pendent des crocs de la Chimère. On trouve dans notre embarcation un chevreau éventré et pourrissant, on voit la dépouille d’une enfant inanimée, la tête dans un abreuvoir, une jeune fille dénudée aux doigts grignotés par les rats. Nous pourfendons et démembrons de démoniaques nourrissons dont nous faisons pleuvoir en morceaux la chair grisâtre, repoussons du pied leurs corps disloqués qui s’amoncellent, nous faisons arracher le nez, périssons étouffé(e) par un flot de vermine gluante, nous voyons réduit(e) à un monceau d’humeurs visqueuses, contemplons avec effarement deux moignons noircis en lieu et place de nos jambes.
Et comme à rebours de trop nombreux LDVELH, notre héros (ni notre héroïne) n’est asexué(e), cela donne lieu, au gré des rencontre et des choix, à quelques scènes explicites.
Spoiler:
Petit voyeur ! Vous perdez 15 points d’Héroïsme !
Plus sérieusement :
Spoiler:
NON, je n’entre pas dans les détails, mais OUI, il y a de la fesse, et c’est même détaillé, torride, voire surprenant, mais jamais vulgaire, ni même gratuit. Dans certains cas, ça touche même aux mœurs de l’époque, avec un vieux marchand babylonien nanti d’une épouse de quinze ans, voire un PNJ ne cachant pas son homosexualité (une touche que j’ai trouvée bienvenue, sans crier au wokisme, et qui donne lieu à une péripétie que je n’aurais jamais imaginée dans un livre-jeu). On sent ma foi que l’auteur s’est fait la main sur ce genre de scène dès l’école secondaire, et que ni Vonotar ni Séquoia n’auront finalement bridé sa verve érotique !
Quelques clins d’œil semblent s’adresser aux routards de la littérature interactive.
Spoiler:
Ainsi, le premier paragraphe se termine par un choix entre trois directions, accompagné d’une touche d’humour méta-ludique : « l’heure n’est pas aux évaluations statistiques ». En effet, il ne s’agit pas en l’occurrence de lancer les dés. Idem, Héphaïstos nous propose au début de l’aventure de choisir entre trois objets, ce qui se fait souvent dans les LDVELH, et nous menace de son marteau sur la tête quand nous lui demandons, en toute logique pourtant, pourquoi nous ne pouvons pas emporter les trois. (La réponse claque : ta gueule, trop cher.) Trois scélérats qui torturent un personnage de petite taille, ça évoque forcément un épisode du Sorcier de la Montagne de Feu. Vous trouver assommé, et vous réveiller enfermé en compagnie d’esclaves potentiels, ça ramène à La Cité des Pièges. Une aiguille empoisonnée qui jaillit du fermoir d’un coffre, j’avais déjà vu ça dans L’Antre des Dragons. Et la Chimère, apparaissant sur la couverture, me paraît cousine d’une certaine Manticore (même si la Chimère représente un antagoniste récurrent, plutôt que le boss final).
En accord avec ce cadre foisonnant, le héros (ou l’héroïne) est nanti(e) d’une épaisseur, d’un vécu,
Spoiler:
On apprend qu’elle ou il a 28 ans, a fait un voyage en Egypte, admiré le temple de Poséidon à Sournion, participé à plusieurs batailles, entendu parler des mines d’argent du Laurion, d’une guerre gréco-punique en Sicile, des cérémonies rituelles d’Eleusis, ainsi que d’un frère de Minos, lui-même ancien roi de Crète et actuel juge des Enfers. Elle / Il connaît la teneur des discours des nouveaux magistrats devant la Boulè ou le nom des trois Gorgones, mais n’a jamais vu de pendule, ni d’ananas. Elle / Il se souvient d’une ritournelle de sa petite enfance, d’un mauvais précepteur, de sa chienne lévrier Balma. Elle / Il s’est vu(e) présenté(e) par l’Ecclesia aux citoyens de Corinthe, où elle ou il s’est battu(e) contre un fort-en-gueule.
ainsi que d’une vie intérieure.
Spoiler:
Elle / Il ressent durant ses traversées de la solitude, de la nostalgie de la terre ferme, mais aussi de l’angoisse quand se déchaîne une tempête. Elle / Il pousse un glapissement d’effroi en voyant au plafond d’une grotte s’allumer des gemmes phosphorescentes, ressent de la frustration, ravale sa fierté face à plus puissant qu’elle ou lui, mais renonce à s’attaquer à un vieillard sans défense, culpabilise de se montrer lâche ou déloyal(e), sent lui monter les larmes devant une titanide en deuil, est saisi(e) d’un haut le cœur en voyant des enfants infirmes, croit entendre à vie un cri d’agonie, s’ennuie à subir le monologue d’un aubergiste borgne, écoute avec un intérêt poli l’art de chasser les lièvres, se sent agacé(e) de se voir collé(e) par un natif aussi niais qu’envahissant, maudit son manque de mémoire, trouve ridicule le maquillage outrancier d’un matamore, discute de solitude et de malaise existentiel avec un automate et même se lie d’amitié avec lui, se laisse bercer par les récits d’un capitaine perse, se sent rasséréné(e) au moment de s’endormir par la vision de son esquif se balançant doucement sous les étoiles, plus prosaïquement cherche à se décrasser. Quand elle ou il sent une ombre planer sur lui, quel soulagement quand il ne s’agit que d’un nuage, et non d’une créature ailée !
Si certains souvenirs sont donc communs aux trois personnages, chacun d’eux jouit également d’un background personnalisé, avec des réminiscences qui lui sont propres. Certains paragraphes sont exclusivement réservés à l’un ou l’autre des trois personnages, dans ce cas le texte passe en italique et la narration, à la première personne. Nous pouvons notamment être reconnu(e) et abordé(e) par des PNJ qui nous connaissent, nous partagent d’autres souvenirs, nous évoquent leurs parcours, s’enquièrent de nos nouvelles.
De plus, chacun d’eux échappe avec bonheur aux stéréotypes de son profil respectif.
Antianera :
Antianera ne se réduit pas à une « Princesse du Temps » sans cesse en butte à des propos sexistes (même si Euclimène, Polydectès voire Zeus lui-même si elle refuse ses avances, lui témoignent une profonde goujaterie, même si son entrejambe attire les œillades timides puis les gauches compliments de Calaïs et Zétès, même si elle ne demeure pas indifférente au charme d’Orphée ou succombe à ceux de Zeus dont l’odeur corporelle lui évoque celle d’un lionceau). Reine de Scythie (où est vénéré le dieu Adonis et où elle disposait de sa propre cuisinière nommée Casédinia), native d’Olbiýâ, elle jouit d’une certaine aura chez les Grecs, Jason par exemple la connaît de réputation. Fière de ses origines et de sa culture scythes, qu’illustrent notamment les forgerons de sa nation, elle juge sévèrement les mœurs d’une Grèce selon elle « décadente et misogyne », où les femmes usent de leurs charmes pour asservir les hommes. Aussi n’apprécie-t-elle pas de rencontrer l’un de ses compatriotes et sujet donnant par son exubérante rusticité une mauvaise image de son peuple. Elle garde en tête les intérêts de sa terre natale, et ne dédaignerait pas d’y revenir avec un certain butin pour financer une guerre contre les envahisseurs Sauromates, Assyriens ou Achéménides, alliés aux dissidents Gélons. Elle ne s’exprime qu’approximativement en langue hellène dont elle ne connaît d’ailleurs pas l’expression « faire l’amour », ni le terme « apostat ». Elle a connu trois amants, dont l’un est mort à la guerre, et lui a donné une petite fille nommée Penthélase, malheureusement morte à sa naissance, ce qui explique son instinct maternel.
Brasidas :
Loin de se résumer à un hoplite sans cervelle dont le lore se résume à casser du Perse, Brasidas est orphelin de père avant de s’être vu abandonné par sa mère, ce qui lui attire l’empathie d’Héphaïstos, et a souffert dans son enfance d’un chagrin d’amour, ce qui l’emplit d’empathie pour Héphaïstos (et bien sûr pour Ariane, abandonnée par son amoureux, négligée par son époux). Il est ému par l’accueil chaleureux des Dioscures, et reconnaît en Castor le fils de son ancien roi Tyndare. Il apprécie la bienveillance et l’humanité du capitaine de la garde Daeton, tout en mesurant la responsabilité qu’implique son poste, lequel Daeton le questionne à son tour sur la situation diplomatique de Sparte et son actuel roi Anaxandridas. Il peut même retrouver sa mère dans les Enfers, apprendre le terrible secret de son abandon et lui pardonner. Comme le juge fort justement Aphrodite, « un cœur tendre [bat] sous la cuirasse du vaillant général ». Profondément humain, il rougit à un compliment, souffre de sa solitude et regrette de ne pas trouver les mots pour exprimer sa passion. En toute subjectivité, j’ai cerné derrière ce personnage une personnification des jouquineurs adolescents que nous fûmes, parfois las de massacrer solitairement des orques dans les œuvres de Ian Livingstone, rêvant d’une relation qui n’advient jamais avec un PNJ féminin, voire d’un flirt IRL qui tarde à venir, et qui malheureusement ne tombera pas sur un coup de dés.
Euclès :
Euclès fils d’Hipponase se déclare lui-même nanti d’une « boîte à souvenirs » : comme Proust, il se souvient des baies de sureaux cuites chaque été par sa mère, pour son bonheur et celui de ses trois frères. Il a voyagé à Chypre, connaît une veuve vivant près de Delphes et qui lui est redevable, a lu des philosophes, est impressionné d’avoir affaire à des Olympiens, subit le mépris d’Héphaïstos quant à son statut de frondeur, quand bien même il a participé dans les rangs d’Athènes à la bataille de Marathon, ainsi qu’il s’en vante devant Ariane dont le sein rond l’émoustille. Il lâche d’ailleurs à l’efféminé Euclimène quelques aléas de la vie de garnison (où à rebours des préjugés, on ne s’y envoie pas tant en l’air que ça) et joue une partie de « plinthion » (jeu inconnu de Google) contre son souverain, le vrai Thésée (fraîchement intronisé roi d’Athènes après le suicide d’Egée, et à ce moment-là en quête de la Toison d’or).
Je termine cette partie par l’enrichissement de vocabulaire que j’ai retiré de ma lecture, en énumérant (par ordre alphabétique) les termes qui j’y ai appris.
D’abord le champ lexical lié au contexte historique :
Spoiler:
acousmaticien, aspis, aulos, aurique, calathos, chiton, daïmon, deben, électrum, épibate, gymnète, haoma, hiérophante, himante, himation, hippagrète, khopesh, kopis, kourgane, lapicide, meltemi, Moïra, naos, oxybèle, paraclisse, pentécontère, salpinx, statère, stylobate, syrtos, tsipouro, triacontère, volumen, xiphose. J’ai enregistré « Boristhène » comme ancien nom du Dniepr, sans reconnaître les autres toponymes mentionnés au paragraphe 450, mais je connaissais déjà « peltaste » pour avoir joué à Rome Total War !
Ensuite le lexique plus général :
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acuminé, béguètement, bôme, clopin, draconique qui semble peu usité, flavescent, hichthyque, huissement, mettre à la cape, rupicole, trifide, thuléen. Je n’avais jusque-là lu « déclore » que dans un certain poème de Ronsard. Je salue l’expression délicieusement anachronique : « remettre les clepsydres à l’heure », voire « suspendu à vos baxas » et « deux pieds dans une même baxa ».
III. La dimension ludique
En sus de la richesse et de la cohérence de cette toile de fond, les règles sont des plus claires et ludiques. Quel contraste quand on sort d’un Loup*Ardent ! Nous pouvons choisir entre des règles simplifiées (qui se jouent sans les dés) et avancées, voire entre trois niveaux de difficulté : épique (hard core), modéré (qui permet de recommencer avec tous les objets, codes et Muses obtenus lors des précédents parcours) ou favorable (qui en sus nous concède carrément une sauvegarde qui nous autorise à revenir en arrière, ressusciter, considérer un combat perdu comme gagné).
Personnellement, il va sans dire que j’ai systématiquement joué avec les règles avancées ainsi qu’au niveau épique, en changeant de personnage après chaque échec. Je ne vous livrerai donc que ce point de vue.
Toujours dans le sillage des Chroniques crétoises, nous disposons de points d’Héroïsme, nous en gagnons ou perdons au cours de l’aventure selon la nature de nos actes et décisions, et nous pouvons tactiquement les dépenser pour modifier le résultat d’un jet de dés, lors d’une épreuve ou d’un combat.
Il existe en effet trois caractéristiques : physique, diplomatie, mental, qui donnent lieu à des épreuves se résolvant avec les dés.
Les combats se jouent à partir de tables qui tiennent compte de l’état physique des protagonistes, ce qui est réaliste, et les assauts successifs se résolvent par des lancers de dés qui aboutissent à toute une variété d’issues, qui nous sont d’autant plus favorables que le résultat est élevé.
En guise de points d’Endurance, nous disposons d’un Niveau de Santé qui baisse à chaque blessure et nous signifie la mort si nous tombons sous le dernier cran. Si nous nous trouvons trop affaibli(e), nous nous trouvons en sus pénalisé(e) dans les épreuves.
(Comme un adversaire même affaibli reste susceptible de nous blesser, et que les occasions de se soigner n’abondent pas, on réalise rapidement qu’il vaut mieux éviter les combats superflus.)
Chacun des trois personnages jouables a ses spécificités en termes de jeu, des modificateur différents (mais toujours positifs) pour certaines caractéristiques. Le Spartiate est évidemment plus bourrin au corps à corps, les autres peuvent lancer des projectiles. Certains paragraphes exclusivement réservés à l’un ou l’autre des trois personnages (voir la partie littéraire) sont susceptibles de lui apporter un bénéfice ludique.
Parallèlement à notre quête, nous pouvons rencontrer les neuf Muses et obtenir leurs faveurs. Chacune d’elles nous confère, au moment propice, un « bonus » variable, qui nous soigne, nous apporte des points d’Héroïsme, nous accorde un objet, nous fait réussir automatiquement une épreuve, voire nous ouvre une option supplémentaire en fin de paragraphe.
Parfois, nous obtenons des informations qui nous orientent sur la direction à prendre, les bons choix à faire ultérieurement, sur la même île ou sur une autre.
On retrouve un système de codes à noter et qui nous servent ensuite, des « passages secrets » à débloquer, avec un numéro à ajouter ou à retrancher au paragraphe en cours quand nous parvenons à tel endroit, rencontrons tel personnage. Selon l’objet choisi en début de quête, des symboles inclus dans le texte nous procurent un avantage. Vous voyez comment sont sollicités les bons vieux procédés ludiques.
Il arrive que notre culture générale (en astronomie et en mythologie notamment) soit sollicitée pour répondre à une question, ou nos notions de mathématiques pour résoudre une énigme gravée dans la roche, voire notre sens littéraire, afin de repérer les rimes d’une question qui nous est adressée. Quand il s’agit de calculer soi-même un chiffre correspondant à un certain paragraphe, le texte nous mentionne les mots par lesquels commence le paragraphe adéquat (et si nous ne les lisons pas au début du paragraphe que nous avons trouvé, cela signifie que nous avons échoué).
Sans compter l’existence d’un « compte à rebours » : au cours de notre navigation et de nos pérégrinations, nous ajoutons systématiquement des points à notre montant d’Errance, sur une échelle qui indique la partie du jour ou de la nuit dans laquelle nous nous situons (la durée des trajets maritimes entre chaque île étant indiquée sur un tableau). La tombée de la nuit peut ainsi interrompre notre exploration. Lorsque nous franchissons un seuil, nous devons nous rendre à un paragraphe qui nous lance dans une péripétie obligatoire. Et comme on peut s’y attendre, le dernier seuil signifie l’échec de notre mission.
Si j’ai déjà mentionné que chaque île se distingue par sa description, chacune propose en sus un défi ludique différent. Parfois, il s’agit prosaïquement d’éliminer un monstre, de récolter un objet.
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Mais sur Syros, nous résolvons essentiellement des énigmes. Sur Délos, nous menons un siège à la tête d’une trentaine de prêtres d’Apollon, et nous devons tenir un compte rigoureux de nos pertes. Il en résulte un combat de groupe bien plus convaincant et palpitant que les batailles rangées des Seigneurs de la Guerre et des Sombres Cohortes. Sur Tinos, nous avons droit à un combat scénarisé dans un champ clos, digne de celui contre le Cyclope dans Défis sanglants sur l’Océan ou contre Aiguchi dans L’Usurpateur d’Irsmun.
Et tout comme dans les Chroniques crétoises, nous n’avons pas à gérer notre bourse.
IV. L’aventure (plus précisément)
L’aventure commence « in medias res » sur Théra, l’île d’Héphaïstos, qui tient lieu de prologue, de tutoriel. Avant même de rencontrer notre commanditaire et de connaître notre mission, nous devons déjà faire des choix, passer des épreuves, mener un combat, et même risquer un PFA.
Nous explorons ensuite les Cyclades en toute liberté et y vivons diverses aventures, en quête de l’indice qui nous permettra de débusquer le niveau final, à savoir la cachette d’Aphrodite, dans laquelle, comme on peut s’y attendre, les points d’Héroïsme, codes, objets et Muses récoltés lors de notre parcours s’avèrent cruciaux pour triompher des ultimes épreuves, et réussir notre mission.
L’enjeu consiste donc à se prémunir au maximum pour cette dernière confrontation, sachant que le temps nous est compté. En effet, nous apprenons rapidement qu’Aphrodite et son amant ont lâché la Chimère à nos trousses, et que ce monstre représente un danger de plus en plus menaçant à mesure que s’écoulent les jours. (Mais oui, à rebours des poètes, rêveurs, utopistes qui poursuivent leur chimère, dans cette aventure, c’est la Chimère qui nous poursuit ! )
Au gré de nos tentatives, nous optimisons et affinons donc le parcours qui nous permettra de réussir notre mission, en réalisant par exemple qu’il est plus avantageux d’aborder les îles dans un certain ordre, sans que l’aventure ne devienne pour autant un OTP.
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Car il existe trois manières différentes d’accéder au stage terminal. Par ailleurs, en fonction du personnage joué, nous aurons intérêt à choisir un itinéraire plutôt qu’un autre.
Plusieurs fins gagnantes alternatives sont proposées (en fonction de nos derniers choix mais aussi parfois de choix antérieurs), ce qui encourage la relecture, et l’épilogue accroît encore la durée de vie en nous enjoignant de déverrouiller deux autres challenges.
En conclusion, je ne peux que recommander ce livre-jeu magistralement abouti, qui coche vraiment toutes les cases, exploite et prolonge avec bonheur le potentiel de la littérature interactive, et plaira aussi bien aux coutumiers du genre, qu’à ceux qui le découvrent. A l’heure de refermer Cyclades, je tire mon chapeau à l’auteur et je me réjouis de découvrir d’autres de ses œuvres.
19.5 / 20
Pourquoi pas la note maximale ? Oh, quelques menues réserves que j’enverrai à Emmanuel Quaireau par message privé. Disons que s’il faut vraiment mentionner un défaut, je dirai qu’en certaines occurrences, nous sommes puni(e) par un combat difficile et inutile sur un simple mauvais choix de direction, comme dans les Livingstone des mauvais jours.
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